mardi 29 août 2023

                                                              💙💙💙💙💙


 

Waouh ! Quel souffle, quelle puissance d’écriture ! J’adore quand les auteurs nous bousculent, quand les personnages continuent à vivre dans nos têtes, bien longtemps après avoir fermé le livre.

2011 – Dans un pays arabe, peut-être en Tunisie.

Nour est une prostituée et une fille de prostituée. Comme sa mère, elle n’a pas eu le choix. Quand sa mère est morte, elle avait 12 ans et les militaires l’ont abusée et dressée sexuellement : toujours sourire, rire, et faire tout ce que l’Homme te demande. La violence des rapports est permanente, le ton est cru.

Pourtant cette prostituée est une femme libre et indépendante. Elle vit de ses charmes dans un studio éloigné de sa maison car elle a une fille, Selma, et veut farouchement que Selma ait une autre vie que la sienne. Faire des études, choisir sa destinée.

C’est d’ailleurs une dénonciation terrible de l’inégalité sociale. Car Nour est lucide, sur la puissance des nantis,  sur l’inégalité profonde entre les deux sexes :

« Un corps de femme, même le plus beau du monde, c’est toujours une forteresse assiégée. (…) Les hommes l’ont réduit à cela. Une prison qui enferme nos désirs, nos passions, notre fragilité. Celle qui enferme notre intelligence, notre sensibilité, notre créativité. Qui enferme notre honte. »

L’amour, elle ne connait pas, mais elle aime profondément un jeune poète homosexuel, Slimane. Tous les deux se comprennent bien, se réconfortent. Tous les deux rejetés, des moins que rien pour la société qui les entoure.

Slimane représente aussi la part féminine de chaque homme. Que beaucoup voudraient enfouir au plus profond d’eux-mêmes.

N’est ce qu’une amitié pour Nour ?... Car elle va le dénoncer, quand il tombe amoureux d’Amine, afin de le récupérer. Récupérer leur complicité et la douceur de leur affection. « Mon Slimane m’est revenu. Je lui serre aussi les mains. Avec les larmes aux yeux. Et avec le sentiment d’être une pute doublée d’une garce. »

2011, c’est aussi le printemps arabe : « un néologisme vide de sens. Les arabes ne connaissent que l’été et l’hiver. »  Tous les deux vont se trouver pris dans la tourmente, remplis d’espoir pour une nouvelle société, plus tolérante. D’autant que Slimane devient l’un des chantres de la liberté avec ses poèmes.

Nour est plus réticente, elle craint que l’islamisme ne remplace le régime corrompu et inégalitaire.

C’est un livre dur, dense, violent. Et pourtant le souffle de liberté avec Nour, avec d’autres femmes, avec Slimane est d’une puissance et d’une beauté absolue. 

Un contraste parfaitement maîtrisé entre la dénonciation de l’oppression et l’ode à la liberté.

Un livre et un auteur à lire. Car j’avais déjà beaucoup aimé « Voyage au bout de l’enfance » et celui-là est tout aussi réussi.

Merci Rachid Benzine !

 

vendredi 25 août 2023

                                                                💙💙💙💙

 


 

Je poursuis ma « cure » de Duhamel. 😀

Cette fois-ci, je vous présente « Fausses pistes », et le ton est donné dès le préambule :

 « Lorsque j’ai décidé de régler mes comptes avec le western, je me suis retrouvé face à un problème de taille : je n’avais jamais mis les pieds au Far West.

Bien qu’amateur de la culture nord-américaine, je savais que dans l’Ouest, un amateur devient vite un pied-tendre.

Un voyage de documentation eût été une solution, mais les voyages coûtent cher, bousillent la planète, et cerise sur le donut, une pandémie mondiale venait de fermer les frontières. »

XXI ème siècle - Sur la scène de Woodstone et dans la vie, Frank Paterson EST  « Frank Wild Faith Johnson », le célèbre Marshall. Tellement habité par son personnage, tellement strict sur la véracité des détails historiques, qu’il est capable de dégainer sur un malheureux touriste, qui prétendait « que Wild Faith était un gros raciste lié au Klu Klux Klan ».

Son manager le vire parce,  que dit-il, il est maintenant trop vieux pour le rôle. Ses collègues se cotisent alors pour lui offrir un voyage de 7 jours en car dans l’Ouest.

Départ pour le Far West des cowboys et des indiens, avec un groupe d’une dizaine de personnes et d’une guide.

Ce n’est pas un vrai western. Quoique…

L’ambiance devient vite tendue, très tendue même,  entre les différents protagonistes, suite à la réflexion d’un Marine qui remet en cause le pacifisme des indiens. N’oublions pas de Jake, ou plutôt  Frank (autant utiliser son vrai prénom) a amené son colt…

L’auteur n’oublie pas au passage, d’épingler la NRA, la légende de l’Ouest américain et tous les radicaux extrêmes, quel que soit le bord. 

Il n’y va pas avec  le  « dos de la cuillère », mais tout est finement observé, et l’humour est grinçant

Toujours en filigrane dans les récits de cet auteur, on retrouve l’analyse, la réflexion. Celle de la quête d’identité de Frank qui se sent vide depuis qu’on l’a déshabillé de son costume de Marshal. On verra s’il y parvient…

J’ai adoré les traits expressifs des différents acteurs et surtout les paysages. Ceux  du désert sont magnifiques.

Réflexion, humour, graphisme sympa. Merci Bruno Duhamel !

 

 

 

                                                                    💙💙

 

 

J’apprécie infiniment les histoires avec les animaux, même si le Sopalin reste souvent à portée de main. Je me réjouissais donc de lire ce roman décrit comme  sensible, intelligent, humoristique, encensé par les critiques et les internautes….

Dé-çue…

 

C’est intéressant comme le sont des milliers d’histoire de chiens, de chats, de cheval, avant cet ouvrage. Rien à voir avec « le chien » de EE Schmitt ou « Marley et moi » de Grogan.

Le style est tarabiscoté et approximatif. Je suis même revenue en arrière sur de nombreuses phrases pour les comprendre.

On va dire que je ne suis pas rentrée dans l’histoire…

Néanmoins, la préface de Jean-Paul Dubois est simple, sensible, bien écrite et belle. Tout simplement belle ! 💙

 


 

mercredi 23 août 2023

                                                        💙💙💙💙


Je fais une cure de Bruno Duhamel.

Après avoir lu, « Jamais » tome 1 et 2 dont j’avais apprécié l’humour, et le graphisme, je récidive avec « #nouveaucontact. »

On le comprend tout de suite au titre, il s’agit d’explorer et de s’amuser à propos de nos travers médiatiques et des réseaux sociaux.

Écosse, Castle Loch.

Doug est un solitaire, toujours l’appareil photo en main. Auparavant, il trompait sa solitude en partageant les photos de son quotidien sur Twister.

Mais… son quotidien a vite lassé « son public ».

Un jour d’ennui, il photographie une sorte de monstre bleuâtre, « médusâtre » sorti des flots… Il n’hésite pas longtemps et la publie sur Twister.

Lui le solitaire, le misanthrope, il a ouvert la boîte de Pandore.  Les réseaux sociaux se déchaînent, sa photo fait le buzz, les médias se déplacent et font le siège de sa maison.

Bruno Duhamel multiplie les coups de griffe ( et c’est plutôt  bien observé) et nous, on s’amuse. Tout le monde en prend pour son grade.

Les commerçants de Castle Loch qui flairent tout de suite l’afflux de touristes et … de bonnes affaires. Sans compter qu’ils vont être interviewés par les journalistes.

« Doug ! Tu viens peut-être de sauver la région ! Voilà des années que tout le monde la déserte, que l’économie est en berne et que mon magasin perd des clients !!! . »

Et surtout les médias, les réseaux sociaux, ainsi  que les différents  groupes d’opinion (dont « Chasse, Famille, Patrie et Cornemuse ») qui s’opposent violemment. Jusqu’à la police et l’armée, à la limite de la paranoïa…  

C’est un joyeux bazar que notre ami Doug a provoqué, alors qu’on ne retrouve toujours pas la trace de la « bestiole »…

A la limite de la caricature, pour notre plus grand plaisir.

Mine de rien, c’est aussi une réflexion sur les réseaux sociaux.  Doug, avec cette mésaventure, revient sur son addiction à Twister en particulier :

« J’ai fait une série de photos de loutres… Mais je ne les regardais plus de la même façon...

Je regardais leur potentiel…

Twister me transformait en marchandises.

Alors, j’ai tout arrêté. De publier et de prendre des photos. »

Sans le miroir de Twister, Doug n’existait plus, et il le comprend.

Le graphisme accompagne admirablement le scénario. Des planches colorées, des traits expressifs. En harmonie avec la tonalité du récit.

Une BD intelligente et truculente. Un excellent moment de lecture.


 

lundi 21 août 2023

                                                            💙💙💙💙💙


 

Terrible et magnifique !

Quand la « grande histoire » nous rattrape par les tripes avec le quotidien de ceux qui l’ont vécu, pensé, craint et ressenti dans leur chair.

XIXème siècle. La colonisation algérienne. L’alternance de deux voix successives, de deux pensées plutôt pour évoquer le quotidien.

Celle de la mère d’une famille de colons. Ses plaintes, ses terreurs en découvrant l’Algérie puis leur vie misérable et dangereuse :

« Sainte et sainte mère de Dieu, si j’avais su ce qui nous attendait, nous autres colons »

Celle d’un soldat d’un bataillon. Les ordres d’un capitaine sanguinaire,  l’engrenage dans la barbarie habituelle, puis banalisée.

Le capitaine, « de sa voix d’ogre » : « Ça veut dire que nous serons sans pitié, nom d’un bordel ! ça veut dire que nous n’hésiterons pas à embrocher les révoltés un par un, brûler leurs maisons, à saccager leurs récoltes, tout ça au nom du droit, de notre bon droit de colonisateurs venus pacifier les terres trop longtemps abandonnées à la barbarie, comprenez-vous bien soldats, ce que cela signifie ? »

L’absurde ou le pire (mais toute guerre ou toute colonisation n’est elle pas absurde ?), c’est que les exactions des soldats français retombent obligatoirement sur les colons.

Il n’y a pas de jugement de la part de Bélezi sur les hommes à cette époque. C’est bien plus fort que cela. C’est toute une pensée, un paradigme qui sont remis en cause. Dont on voit sur le terrain, en chair, en sang et en larmes ce qu’il signifie et ce qu’il provoque.

Un magnifique plaidoyer contre toutes les guerres, contre les horreurs et la barbarie.

 

L’écriture semble erratique, comme l’est le cheminement de la pensée, sans filtre, sans recul, devant le quotidien,  « hantée par Faulkner » ( comme l’indique l’éditeur). Et je suis d’accord d’autant plus que j’avais adoré « Le bruit et la fureur », et que j’en garde un souvenir précis.

Même si Mathieu Bélezi n’est pas allé aussi loin que l’écrivain américain, qui ne finissait pas souvent les phrases des protagonistes qui s’exprimaient. Comme lorsqu’on pense : on passe d’une idée à une autre sans parfois terminer la première.

 

Un magnifique roman, consacré par le Prix Inter 2023, largement justifié.

Chapeau bas, Mathieu Bélezi !

jeudi 17 août 2023

                                                              💙💙💙💙💙


 


 



L’histoire d’Adrien, gueule cassée dès les premiers jours de la guerre, sans même combattre. Sa souffrance physique et morale : « Mes blessures au visage me causent moins de souffrance que cette défaite sans combat, que l’absurdité de mon sort que je n’ai ni construit, ni défendu. »

Pendant 5 ans, dans une chambre du Val de Grâce, il va partager la vie d’autres officiers défigurés également. Des amitiés solides se constituent qui se prolongeront au-delà de 1918.

Ce qui m’a touchée, c’est qu’Adrien représente des milliers d’hommes. Il est beau, intelligent, instruit, promis à une belle carrière et à une vie de famille épanouie. La guerre et sa barbarie, le font basculer dans l’horreur et l’exclusion.

On comprend mieux, non, on ressent mieux grâce à cet exemple particulier, le calvaire des soldats, des accompagnants, des soignants. Une souffrance que les autres (ceux qui ne l’ont pas faite, cette « der des der) ne peuvent même imaginer.

Ce qui m’a touchée également, c’est l’amitié profonde de tous ceux qui ont partagé la même galère. Comme un lien de sang, aussi indéfectible, c’est un lien de souffrances, de regrets qui les soude jusqu’à la mort.

Le dessin accompagne harmonieusement le texte. Les traits sont expressifs, les couleurs sont belles et adaptées à la tonalité précise du récit. L’horreur est montrée sans voyeurisme. C’est la réalité, le soldat a du mal à l’accepter, le lecteur aussi. Tous les deux embarqués dans le même cauchemar.

Et enfin, j’ai adoré les extraits du roman de Marc Dugain, particulièrement à propos dans la trame de l’histoire, comme lors de la mobilisation :

« Le 12 novembre, l’enthousiasme de la victoire est retombé comme les feuilles d’automne.

Nous imaginions la démobilisation, tous ces hommes sains et saufs qui rejoignaient leur famille. Tant qu’ils étaient là-bas, au front, dans la boue et le froid, sous l’étreinte de la prochaine offensive, nous arrivions à nous considérer comme chanceux.

Maintenant que les canons se sont tus, que des cohortes de soldats démobilisés retrouvent les leurs dans l’allégresse, nous nous sentons les derniers des vivants. »

Extraits accompagnés d’un simple dessin au coloris sépia, très délicat, en parfaite osmose avec le texte.

Terrible et émouvant. Une vraie réussite, sur un sujet difficile !

 

lundi 14 août 2023

                                                              💙💙💙💙💙


20 ans après. Relecture de ce terrible roman. Il n’a pas pris une ride et hélas, il est toujours d’actualité…

 Kaboul. Les années postsoviétiques et la prise de pouvoir par les talibans : « la ruine des remparts a atteint les âmes. La poussière a terrassé les vergers, aveuglé les regards et cimenté les esprits ».

A l’intérieur de cette ville en proie à la tyrannie et à la barbarie, deux couples.

Atiq, un geôlier qui ne pense plus, ne croit plus à rien et sa femme Mussarat  atteinte d’une maladie incurable. Et Moshen,  ancien notable, amoureux fou de Zunaira, « magistrate licenciée par l’obscurantisme. » Comme l’ensemble des femmes, elle doit sortir habillée de son tchadri qui la couvre de la tête aux pieds. « Avec ce voile maudit, je ne suis ni un être humain, ni une bête, juste un affront ou une opprobre que l’on doit cacher comme une infirmité. »

Pour survivre, il faut cesser de penser, il faut cesser de respirer : « Moshen a cessé de rêver. Sa consciente s’est éteinte. Il s’assoupit dès qu’il ferme les yeux et ne ressuscite qu’au matin, la tête aussi vide qu’une cruche. »

Pas de manichéisme chez Yasmina Khadra. Chacun essaie de survivre avec ses désirs, ses lâchetés face à l’horreur. Atiq ne supporte plus sa femme malade et l’amour dévorant qu’elle lui porte. Il voudrait la voir morte physiquement. Comme il est mort, lui, dans la tête et le cœur… En même temps, il ne veut pas la répudier…

Zunaira va reporter toute sa honte, toute sa haine, de n’être plus rien sur son mari Moshen.

Pourtant la poésie est présente avec l’amour fou qui dévore les personnages. Seule antidote à l’anéantissement.

Écriture somptueuse, phrases courtes, mots appropriés percutants qui portent d’un bout à l’autre la tragédie de l’histoire.

Un récit intense  et puissant où chacun comprend avec son cœur et ses tripes, l’asservissement des hommes, l’exclusion des femmes, la non-vie.

Du grand Khadra ! 💙

 

samedi 12 août 2023

                                                                  💙💙💙💙



Sacré défi pour le premier roman graphique de Victor Pinel, auteur et dessinateur. Démontrer que la vie sociale est semblable à une partie d’échecs. Les personnages sont ici, les pièces du jeu, tous différents, mais tous importants. Même si on est un pion, on a un rôle à jouer et il peut être déterminant.

On va donc croiser le parcours de Samir, identifié comme un fou, celui de Marion, comme un roi, celui de Lys (magnifique personnage) comme un cheval, et ainsi de suite.

La difficulté est importante, l’ensemble des acteurs doit finir par se rejoindre pour former une seule trame dramatique (principe du roman choral).

Un conseil pour bien suivre le déroulé de notre partie, sur le terrain de la vie : identifier au plus vite les différents protagonistes pour ne pas être perdu.

C’est une belle leçon de vie : chacun va jusqu’au bout de son parcours quelles que soient les embûches rencontrées, en cheminant avec ce qu’il est, ses forces, ses ratés : « On apprend plus quand on perd que quand on gagne ».

Un pion n’aura pas le même parcours que le fou, et la tour se déplacera plus facilement que le cheval. Le roi est le plus important, mais c’est aussi le plus fragile, l’objet de toutes les convoitises. Peu importe, on se réalise avec ce qu’on est.

Tous les personnages sont attachants, c’est une grande force de Victor Pinel dans ses dessins. Je l’avais déjà constaté dans « Le plongeon » dont la scénariste était Séverine Vidal.

Madame Dubois, la vieille dame qui initie Samir aux échecs est odieuse, mais aussi jubilatoire et touchante par son franc-parler. A Samir, qui veut lui tenir compagnie, elle dit : «  Ne perds pas ton temps, gamin. Sors d’ici. Je suis sûre que tu trouveras un autre mourant à emmerder. Il y en a plein ici ! »

J’ai apprécié cette BD pour ce challenge très ambitieux : la mise en place de l’interconnexion des personnages en respectant leur place sur l’échiquier.

Corolaire de cette exigence : le récit manque de fluidité. C’est parfois un peu difficile de se retrouver  dans les relations de chacun.

D’autant plus, que les traits de certains protagonistes sont très (trop) proches, comme Samir et Vincent, comme Marion et Julie. Et de fait, rendent la lecture plus ardue. 

Mais bon, une partie d’échecs, ce n’est pas facile non plus, et on va se dire (car j’apprécie infiniment Victor Pinel) que le récit est à l’image d’une partie. Si on veut gagner, cela se mérite !

Cela constitue une excellente BD, à mettre entre toutes les mains, et surtout, ceux des passionnés des échecs.

Je remercie Babélio et les Éditions Grand Angle (dont j’apprécie infiniment les publications) de m’avoir permis de « jouer » et de remporter un grand moment de plaisir. 

mardi 8 août 2023

                                                             💙💙



Un livre surprenant où les vivants et les morts se côtoient, où les époques se superposent, où chaque chapitre est l’histoire (à la 3éme ou à la 1ere personne) d’un narrateur différent.

Je suis devenue très rapidement un fantôme, moi aussi, à la recherche des personnages : qui était qui ? qui faisait quoi ?

C’est dommage car le parcours et l’analyse psychologique de Chen Tienhong sont intéressants : « Quand sa mère le frappait, ses poings étaient des couteaux et ses pieds des épées, mais la plus grande cruauté résidait dans ses paroles, ce déversement d’insultes en taïwanais dont chaque mot était une brulure. Contre les coups, il n’opposait pas de résistance. Il se sentait coupable, c’est lui qui était un pervers, qui était anormal.»

C’est dommage aussi car les conditions des femmes taïwanaises sont bien évoquées avec les cinq sœurs ( dénommées : « première », « deuxième » troisième » quatrième » cinquième » ) de Tienhong.

Mais c’est perdu dans un flux d’autres histoires, d’autres détails.

Je remercie Babélio et les Éditions du Seuil de m’avoir permis de découvrir ce pan de la littérature taïwanaise.

 



dimanche 6 août 2023

                                                                         💙💙💙

On parle toujours des favorites de Louis XIV, mais jamais de leur mari.

A l’époque, un mari trompé par le roi est un homme comblé et enrichi.

Tous sauf….. Le mari de madame de Montespan. Il aime  passionnément sa femme et va tout faire pour la récupérer.

Quelle drôle d’idée de ne pas accepter cette bonne fortune d’adultère !  Même le père de sa femme lui reproche : « Louis-Henri, être cocu, c’est la chance de ta vie ».

En plus, le Montespan est un têtu. Toute la cour va ragoter et s’amuser à propos du carrosse de Louis-Henri, qui arbore  deux magnifiques paires de cornes. Car il a aussi le sens de l’humour...

Il n’empêche, s’opposer à la volonté du roi est lourd de conséquence. Le Montespan va tout perdre,  pourtant, il ne pliera pas sous la volonté du roi.

Une histoire truculente, avec le langage vert de Jean Teulé, qui en profite pour égratigner les mœurs libres de la cour. Question de la Duchesse de Montausier au mari trompé et revendicatif : « Il y a quatre ans que vous êtes marié et vous aimez encore votre épouse ? »

C'est toujours intéressant de découvrir les ignorés de l’histoire, comme Louis-Henri, qui n’est rien d’autre que « le Mari  ». Un pied de nez à l’Histoire classique, qui correspond aussi  à « l’esprit Jean Teulé ».

Heureusement que l’histoire est intéressante et bien « ficelée », car je ne suis du tout pas rentrée dans le graphisme que j’ai trouvé très léger et peu approprié à l’époque décrite.

Un bon moment de lecture à partir du roman éponyme de (feu) 😢 Jean Teulé.


vendredi 4 août 2023

                                                                 💙💙💙💙


 

Un roman harmonieux, à la fois tendre et humoristique.

Nana est un chat de gouttière, sauvé par Satoru, après un accident de voiture. Lui, le chat libre, au parler « cash », s’attache à Satoru et choisit de rester avec lui. Et même de l’accompagner, quand Satoru, pour des raisons mystérieuses, doit trouver une autre maison pour adopter son compagnon préféré.

Qui de mieux pour l’accueillir que ses anciens amis de jeunesse, ou sa tante ?

Satoru l’a appelé Nana ( 7 en japonais) , car sa queue, vue du haut, forme un 7, et c’est un chiffre porte-bonheur.

Cette recherche est le prétexte d’un retour sur le passé de Satoru.

Un enfant qui a perdu ses parents très tôt et a pris l’habitude d’accepter les situations difficiles et de faire avec. Cela a commencé très tôt, avec des parents trop souvent absents, c’était « un enfant avec clé » :

« Depuis qu’il était tout petit, il savait que ses parents aimaient trop leur métier. Tout comme il savait qu’ils ne s’intéressaient pas beaucoup à lui. C’est pour ça qu’il s’était toujours efforcé de leur compliquer la vie le moins possible. »

La narration est surprenante, originale, mais très agréable : dans la même page, l’auteur raconte, puis, Nana interrompt le propos et égratigne les personnages rencontrés. Tant les humains que les autres animaux, notamment les chiens : « Il suffit que leur maître dise noir, même si c’est blanc, ce sera noir. »

Ce road-movie de recherches de la bonne maison pour Nana est également une balade dans les quatre coins du Japon et dans différents milieux.

Le personnage de Satoru est très attachant, émouvant, au fur et à mesure qu’on découvre son histoire et ses proches. Heureusement que Nana est là pour donner la touche drôle.

Une belle histoire, avec la juste dose d’émotion et d’humour, comme sait si bien le faire la littérature japonaise. Pas « gnian-gnian » du tout sur l’amour qui lie profondément les humains et les animaux.

Un feel-good intelligent, et ce n’est pas si fréquent que cela !😀