samedi 30 septembre 2023

                                                                    💙💙💙💙💙


 

« Belle-Île, un endroit enchanteur au large du Morbihan, un lieu merveilleux pour tout un chacun en quête d’aventure ou de dépaysement. Mais pendant presque 100 ans, l’île a accueilli des mineurs délinquants, « de la mauvaise graine à faire trimer et à mâter ». Ces enfants aux cranés rasés et habillés de la même blouse grise n’ont pas profité de ce lieu magnifique : c’était leur « bagne ».  Archives et patrimoine du Morbihan.

La « colonie » a fonctionné de 1880 à 1977.

 

11 octobre 1932 – centre pénitentiaire de Belle Ile en mer

Jules Bonneau, « la Teigne », un enfant de 13 ans, raconte son histoire.

« La Teigne ! 

Personne n’a le droit de m’appeler comme ça. Jamais. C’est mon nom de guerre, gagné à force de dents brisées. Moi seul le prononce. Je le revendique et les autres le craignent. Aucun détenu, aucun surveillant, pas même Colmont le directeur ne peut l’employer. « La Teigne », c’est mon matricule et ma rage. Mon champ d’honneur ».

 

Cet extrait au début du roman résume parfaitement l’état d’esprit de Jules. Il a très vite compris que LA LOI DU PLUS FORT  règne en maître dans le bagne où il subit la violence et l’injustice de la réclusion. Des enfants jugés et condamnés par la misère, l’abandon, les larcins mineurs pour manger et survivre.

Il a donc le coup de poing facile, ne se laisse pas faire par les caïds et résiste aux injonctions des gardes chiourmes. Il n’a qu’une idée : s’évader en sachant que les chances de réussite sont infimes.

Un révolté face à l’autorité des adultes qui l’ont enfermé. Un gamin que la rage possédera jusqu’au bout de sa vie. Les marques de l’enfance sont indélébiles.

J’ai aimé le personnage de Jules, tout en nuances et en contrastes : violent, sans pitié  envers les autres, rebelle envers les gardiens. Et en même temps protecteur envers les plus vulnérables, comme Camille Loiseau, un gamin trop tendre dans ce milieu de haine. En même temps, Jules est sensible à l’affection que lui portent les marins qui l’accueillent lors de sa fuite du bagne. On peut même penser que cet amour le sauvera de la rage qui couve en lui.

Mais Jules Bonneau est d’abord et avant tout un être entier. Quand il défend quelqu’un, il va jusqu’au bout, au-delà de sa propre sécurité, porté par sa révolte, par la violence qu’il a subie.

Les thèmes principaux de ce livre sont l’injustice, la violence et le mépris faciles envers les plus jeunes, les plus faibles.

L’écriture est puissante : marquée par la sincérité et le réalisme.  Elle nous touche au cœur et  aux tripes. Sans doute, parce que la voix de Jules est aussi celle de Sorj Chalandon marqué par la violence paternelle.

Le paysage politique des années 30 est présent en filigrane et bien décrit par les extraits de journaux que Jules arrive à se procurer et à commenter. Les mouvements d’extrême droite sont parfaitement incarnés par des personnages bien campés, particulièrement crédibles. Eux aussi incarnent la violence, le mépris de la justice et  la loi du plus fort.

J’ai infiniment aimé ce roman puissant, dense, magnifique et terrifiant à la fois. Du grand Chalandon !

Merci à Netgalley et aux éditions Grasset de m’avoir permis de découvrir ce superbe roman.💗

 

 

mercredi 27 septembre 2023

                                                                       💙💙💙💙

Un peu de légèreté et de gourmandise, aujourd’hui ?

Un livre très complet de recettes autour des fruits de saison. Comment confectionner une excellente marmelade acidulée de kiwis, faire sécher ses abricots ou ses figues au soleil, faire plaisir aux plus petits ( et aux plus grands ) avec une pâte de fruits aux nectarines et fruits rouges ?

Vos pommes font la tête et commencent à s’abimer ? En 10 mn, le crumble pommes / spéculos est réalisé et tous les convives se régalent.

Ce que j’ai le plus apprécié : le dosage fruits / sucre où ce dernier est minoré au possible. Pour laisser la part belle aux fruits.

Quoi de mieux en hiver qu’une délicieuse confiture de cerises au sucre de bouleau ?

De plus, les recettes sont claires, précises, en un mot : inratables ! 

Un coup de cœur gourmand !  😀


 

vendredi 15 septembre 2023

                                                                    💙💙💙💙


Saint-Malo – Aujourd’hui.

Marie Rivalain est une jeune femme solitaire, très impliquée dans son travail d’attachée de presse auprès des écrivains.

Notamment pour Pierre Le Guellec, nouveau lauréat du prix Nobel, qui part pour Stockholm….

Sauf que… Son éditeur, les personnes du Nobel l’attendent en vain, à sa descente d’avion.

Que lui est-il arrivé ? A-t-il disparu volontairement, est-il mort, s’est-il fait enlever ?...

Marie qui loge chez lui, qui le connaît bien, sait qu’il a horreur des mondanités, des prix de toutes sortes…

Pourtant : « Pierre le Guellec disait avec simplicité et modestie toute sa joie de recevoir un prix si prestigieux. Ce que cela signifiait pour lui, fils d’une famille de pêcheurs sur dix générations, qui ne savaient ni lire, ni écrire et avaient passé leur existence battus par les vents, les corps secoués de  tempêtes, brisés sur les écueils de Terre-neuve, à pêcher la morue sept fois par an. (…) A quatorze ans, son père l’avait fait embarquer avec lui sur le Victor-Pleven, le dernier terre-neuvas, pour son ultime course. Une expérience fondatrice : pour la première fois, je me confrontais à l’absolu, je ne devais jamais l’oublier. »

Quelqu’un d’authentique dans ce monde très médiatisé.

Mais Marie qui enquête à Saint-Malo, va vite découvrir qu’entre l’image proposée au public, et la réalité de la personne et son histoire, il y a souvent un grand fossé….

A-t-elle été dupée, trahie par Pierre ? Elle pensait qu’il la considérait comme une amie, quelqu’un à qui on peut faire confiance…

Ce que j’ai aimé dans cette histoire, c’est le suspens parfaitement bien maîtrisé par l’auteure, l’analyse psychologique très fine de Marie et surtout, les coulisses du monde de l’édition…

Pensez donc ! Un Nobel !... Chaque éditeur en rêve, peu le réalisent.

Comment transformer une disparition (volontaire ou non. Là n’est pas le sujet pour l’éditeur) en un accroissement significatif des ventes et de la notoriété de l’éditeur…

Jusqu’à la dernière page, l’autrice réussit à surprendre son lecteur.

Un excellent moment de lecture, agréable, bien écrit et intelligent.

lundi 11 septembre 2023

                                                                  💙💙💙

Un peu de maths ? 😂

Si on considère que : A + B ( Kay + Cyril, un couple anglais ) décident à 60 ans de se donner la mort à 80 ans, quelle est la probabilité de la réalisation de leur volonté ?

Vous avez 2 heures….

 

L’auteur a décliné, comme dans le film d’Alain Resnais : « Smoking, no smoking » les différentes conclusions possibles.

Ce qui paraissait attrayant, traîne surtout en longueur avec l’éventail des multiples scénarios. Pour moi, le récit s’est arrêté au premier tiers du roman et cela aurait largement suffi.

Car le ton est vif, souvent humoristique, les personnages parfaitement bien campés et crédibles. L’analyse du grand âge, avec notamment la difficulté des aidants des patients Alzheimer, est  très réaliste et en effet, suscite les questionnements. Quand on vieillit, on n'a pas envie de faire supporter à nos enfants, notre déchéance physique et /ou mentale...  

Dommage ! 😞

De plus, l’environnement politique et social anglais des années pré-Brexit et du gouvernement de Boris Johnson est particulièrement jubilatoire.

Un très bon roman, dans sa première partie.


 

mercredi 6 septembre 2023

                                                                   💙💙💙💙


Un aéroport en France.  Une famille au complet, parents, grands-parents, oncle-tante accueillent une petite fille de 4 ans, Qinaya. Rescapée d’un tremblement de terre au Pérou, elle est adoptée par Alain et Lynette qui ne peuvent avoir d’enfants.

Ils sont tous ravis, attendris par cette petite fille un peu perdue dans ce concert de bonheur.

Tous, sauf un …. Le grand-père Gabriel se tient en retrait et râle. Comme d’habitude… C’est qu’il aime surtout sa tranquillité, sa bande de potes et les bons repas, sans « se prendre la tête » avec une petite fille.

Pourtant, les choses vont vite changer car, comme tous les grands parents, ils vont devoir garder la petite. Comme le dit si bien Gabriel à sa femme : « Moralité, ils adoptent, mais c’est nous qui héritons. »

Pourtant aussi, notre Gabriel, bougon, taiseux et surtout pudique, ne va pas résister aux élans affectueux et spontanés de Qinaya.

L’amour d’un enfant, sa confiance, personne n’y résiste et cela, Arno Monin a su parfaitement le dessiner. Voir le bas des planches des pages 39 et 47.

Un excellent binôme de scénariste et graphiste : des personnages parfaitement campés, très crédibles, des traits expressifs sur des planches joliment colorées qui expriment bien la vie quotidienne.

L’émotion est également présente avec les souvenirs de Qinaya relatifs au Pérou, les questions des parents, et surtout la fin de ce premier tome, très inattendue…

Je vous laisse découvrir et attends avec impatience de découvrir les deux autres tomes…

 


 

mardi 5 septembre 2023

                                                                    💙💙💙💙

 


 

Une enquête précise, pédagogique, et toujours une petite pointe d’humour. Vincent Lucchese a aussi beaucoup d’empathie pour le lecteur : il imagine son abattement  au fur et à mesure qu’il avance dans le dossier, et utilise le clin d’œil pour dédramatiser la situation.  

De façon très simple, l’auteur nous explique le cycle de l’eau, comment il fonctionne, comment l’eau est utilisée et  les disparités entre les régions.

« En France (…), si l’on regarde les volumes consommés, on arrive à 5.3 milliards de m3 par an. Le refroidissement des centrales compte pour 31% de ce volume, mais le premier consommateur est l’agriculture avec 45% du total. La production d’eau potable complète le tableau avec 21% loin devant les 3% d’usage industriel. »

Grâce à cet essai, j’ai enfin compris la mécanique de l’effet de serre. La littéraire pur sucre que je suis, 😀 a besoin d’explications simples (très simples même), mais précises pour comprendre des éléments plus scientifiques.

Cet ouvrage est très bien fait car il analyse les différents facteurs de la raréfaction de l’eau. La perturbation du cycle de l’eau par les réchauffements climatiques, le rôle de l’agriculture  intensive avec le problème des retenues d’eau, le rôle de l’énergie. Faut-il choisir entre se chauffer et la conservation de l’eau ?

Une situation compliquée, préoccupante, une vraie guerre pour l’or bleu. Sauf que l’auteur reste optimiste et parie sur l’intelligence des différents acteurs. Une agriculture  moins gourmande en matière d’eau, le maïs est peut-être à oublier…  Utiliser moins d’eau pour les circuits de refroidissement des centrales « par échange thermique avec l’air extérieur. C’est ce que font les aérocondenseurs »

De plus, c’est une véritable enquête sur le terrain, dans les différentes régions françaises. Et là, c’est tout de suite plus vivant et beaucoup plus compréhensible.

Avoir la terre collée à ses chaussures permet de mieux appréhender la réalité.

Un excellent documentaire, à lire à petites doses, en prenant quelquefois des notes. Toutes ces info ramassées dans un seul terme  « réchauffement climatique » et rabâché par les différents médias, prend d’un seul coup, tout son sens et devient beaucoup plus proche, mais aussi plus inquiétant.

D’où la nécessité d’en prendre compte et d’agir.

Merci Vincent Lucchese !

(Photo de la Venise verte)

 

 

vendredi 1 septembre 2023

                                                                   💙💙💙💙


 

Le titre illustre parfaitement le sujet : l’esprit des Lumières, de la raison, des connaissances, des rêves d’égalité et de  liberté, et tout ce qui se cache derrière, le vice,  l’élitisme, l’impunité des puissants.

Madame de Clairefont est une femme intelligente, cultivée, droite  et honnête. Elle se veut libre de son corps, de sa pensée, à une époque où les femmes n’ont pas leurs mots à dire. « Une femme est en droit d’apprendre et de penser et (…) la liberté d’esprit ne fait pas d’elle une libertine. »

Elle est harcelée (terme du 21ème siècle) par le chevalier de Saint Sauveur, qui veut en faire sa maîtresse. Un libertin pervers et malfaisant prêt à tout pour parvenir à ses fins.

Alain Ayroles reprend les lettres (réelles ou pas) du chevalier de Saint Sauveur et le genre épistolaire convient parfaitement à la narration. D’abord, il correspond aux mœurs de l’époque, et permet de passer d’un personnage à l’autre sans difficultés.

L’écriture bien adaptée au style du 18ème siècle, permet une parfaite immersion dans le récit, y compris le ton cru de certaines réparties qui apportent piment et humour : « Ai-je d’autres choix, dans un monde fait à l’usage des mâles ? Me comporter comme une garce m’évite d’être traitée comme une putain. ».

Le graphisme de Richard Guérineau est somptueux. Précis et réaliste, tant en matière de costumes que de paysages urbains ou campagnards. Ces planches sont un vrai régal pour les yeux.

Il maîtrise parfaitement la variation du ton des planches : chaud pour les scènes érotiques, doux pour le quotidien, et beaucoup plus éclatant pour les mondanités.

Mais…  😞 Et c’est bien dommage !  L’intrigue est légère, poussive, convenue.

Cela n’empêche : rien que pour le ton de l’époque parfaitement rendue et le graphisme de Richard Guérineau, je ne regrette pas d’avoir lu cette BD

Merci à Netgalley et aux éditions Delcourt de m’avoir permis de découvrir ce roman graphique.