samedi 24 mai 2025

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Novembre 1934 – Biescas de Obago - Un petit village espagnol pyrénéen

Un village où il ne se passe jamais rien… Vraiment ?

📌Un article de presse que chacun juge fallacieux, provoque l’émoi et la colère des habitants.

Tout de suite, on sait qu’il s’est passé quelque chose d’important qui a failli remettre en cause la paix de ce village bien paisible en apparence. Mais quoi ?... L’instituteur et narrateur, chargé de collecter les faits auprès de chacun doit restaurer la vérité. 

Pas sûr que la population soit prête à l’entendre cette vérité….

Un instit bien peu considéré : « Tous s’accordèrent sur le fait que s’occuper du bétail et des terres est plus important que la tâche peu productive d’enseigner aux enfants à lire et à écrire. »

C’est de Ramon, un jeune berger, dont il est question dans ce bourg perdu dans les montagnes, régi par les notables, défini rigoureusement par des strates sociales et les niveaux de richesse des « casa »

Déjà, il préfère lire en gardant les brebis… La lecture, une occupation suspecte. Et puis, c’est « un esprit retors et pervers » car enfant, il volait des fruits dans les vergers…

Pourtant l’instituteur se rappelle au contraire un gamin « qui apprit rapidement le peu de choses que j’eus le temps de lui enseigner. »

Un jeune homme solitaire et différent…

« Je sais maintenant que tous considéraient ce penchant pour la lecture comme un signe d’étrangeté, comme un stigmate qui le marquait et le séparait des autres. »

Il travaille pour la Casa Torrera dont le maître et patriarche est Don Mariano. Une seule fille, Alba, de l’âge de Ramon. Pas d’autre enfant, car Mariano en attrapant les oreillons, est devenu la risée du village, « Le chapon » …

Les temps sont durs et les moqueries servent de soupape de sécurité aux plus pauvres.

Don Mariano devient alors un « rustique et pathétique Don Juan » auprès des femmes du village qui ne craignaient pas de tomber enceintes. Il n'a plus qu'un seul objectif : bien marier, cela veut dire richement, sa fille chérie.

Dès l’âge de 13 ans, Alba et Ramon sont amoureux. De ces amours d’enfance qui durent une vie.

Le gamin questionne

« _ Qu’est-ce que je peux faire pour gagner beaucoup d’argent ?

_Et pourquoi, veux-tu gagner beaucoup d’argent ?

_ Pour me marier avec Alba, celle de la casa Torrera. »

Ramon économise de l’argent, achète quelques brebis jusqu’au moment où il est viré comme un malpropre par Don Mariano, au courant de ses projets.

Ramon choisit la seule solution rapidement rentable : la contrebande entre les deux pays frontaliers. D’abord de marchandises, puis d’armes…

📌Ce n’est surtout pas mièvre, ni banal, ni manichéen.

Lorenzo Mediano excelle à descendre dans les tréfonds de l’âme.

Ramon est à la fois une figure chérie et détestée par les plus pauvres. Il incarne le rêve, le possible et en même temps, il renvoie ce que la majorité d’entre eux a peur de faire.

Pour les plus riches, c’est LA figure rejetée par excellence : l’humiliation causée par un misérable qui ose prétendre à la main d’une fille riche, et l’angoisse de se voir un jour, descendu de son piédestal de tout-puissant par la piétaille. Angoisse de l’égo, angoisse économique…

Pour tous, c’est le rejet d’un pauvre qui ose bousculer l’ordre établi.

📌 Le narrateur reconnaît aussi le caractère impitoyable de Ramon, tout entier, livré à son objectif : être riche pour gagner la main d’Alba. Les passionnés qui iront jusqu’au bout de leur objectif sans prendre garde à ceux qui tombent à leur côté. Et Alba est façonnée de la même façon.

📌 La plume est riche, précise, juste et merveilleusement évocatrice. En lisant, les images défilaient dans ma tête, comme sur l’écran pour un film.

📌 Un récit puissant, où plusieurs jours après avoir refermé le livre, les personnages continuaient de vivre dans ma tête.

Ce qui est pour moi l’indication d’un signe que je reconnais entre mille : un coup de cœur !

Merci aux éditions Zulma !

 

Extraits

📌  « Tous s’accordèrent sur le fait que s’occuper du bétail et des terres est plus important que la tâche peu productive d’enseigner aux enfants à lire et à écrire. »

 📌 « Ceux qui achètent le journal ne souhaitent pas, au fond, comprendre quoi que ce soit : ils souhaitent juste avoir l’illusion de savoir mais sans y consacrer le temps nécessaire. »

 📌 « Moi, qui plus quiconque aurait dû me rebeller contre le mensonge, par peur j’ai prostitué ma plume. »

 📌 « Et cette paix ne pourra venir que de la vérité, même si les gens ne veulent pas la voir. »

 📌 « Le mot casa. La maison, casa, n’est pas un bâtiment, constitué de pierres pour les plus riches, de briques, pour les plus pauvres ; (…) mais elles comprennent aussi les personnes qui les habitent, les champs, les animaux, les métayers, les domestiques, les enfants qui y naissent, les bêtes de somme, les outils et le matériel agricole, l’huile des lampes, les vignes et les arbres fruitiers et même les petites et grandes économies faites de sacrifices pour acheter un mulet ou payer un médicament. »

📌 « Je sais maintenant que tous considéraient ce penchant pour la lecture comme un signe d’étrangeté, comme un stigmate qui le marquait et le séparait des autres. »

 📌« _ Qu’est-ce que je peux faire pour gagner beaucoup d’argent ?

_Et pourquoi, veux-tu gagner beaucoup d’argent ?

_ pour me marier avec Alba, celle de la casa Torrera. »

 📌 « Qu’il n’aimât pas aller voir les femmes, ni se distraire en jouant quelques centimes aux cartes ! Non, il n’était vraiment pas normal. Et en plus, il lit ! »

 📌« Nous voulions qu’un berger se marie avec une héritière et qu’il mange bien et qu’il n’ait pas froid en hiver. »

 





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