samedi 4 mars 2023

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Téhéran – 1977. « Ce roman s’inspire d’une histoire vraie, celle du musée d’Art Contemporain de Téhéran ouvert en 1977. Un musée dont le destin est intimement lié à celui de son gardien, gamin des bas quartiers, qui a contribué à sauver et conserver les trésors de l’impératrice Farah Diba, lors de la Révolution Islamique de 1979. »

 

Cyrus est un  jeune homme pauvre, discret, sensible qui va travailler au Musée d’Art moderne de Téhéran, joyau de la Chahbanou.

Cyrus ne connaît rien aux peintures et pourtant, tout de suite, les tableaux vont lui parler, vont donner un sens à sa vie. Ce musée devient sa bulle d’oxygène.

Car l’Iran est un pays de contrastes et tout au long du récit, l’auteure saura parfaitement l’illustrer.

 

Contraste entre les iraniens, la volonté de modernité pour les uns, de repli et de religion pour les autres.

En quelques mots précis, c’est particulièrement bien évoqué :

« Dans le taxi collectif qui le conduit près du parc Laleh, coincé en entre une adolescente en minishort, maquillée comme une voiture volée et une grand-mère accrochée à son chapelet, sous son tchador… »

 

Contraste entre les fastes du Shah et la misère de la population. Et ce fossé s’agrandit inexorablement durant ces deux années.

La célébration des 2500 ans de l’Empire Perse est particulièrement significative : « c’était le festin de la démesure, une incroyable débauche de luxe et de fastes, la féerie des Mille et une nuits, grandeurs nature. Une partie du pays criait famine… »

 

Contraste entre la personnalité discrète, timide de Cyrus et le contexte historique enflammé. Contraste entre sa lucidité, car il redoute, ne serait-ce qu’en voyant le portrait sévère de Khomeini, une dictature bien pire à la situation qu’il connaît actuellement, alors que les iraniens le voient comme Le Sauveur.

En fait Cyrus est le « révélateur » de ce qui va se produire, et il permet au lecteur de mieux appréhender la réalité historique : « La nouvelle République Islamique prône la disparition des corps, la population s’efface, elle n’est plus que voile et froissement de longs tissus. Le voile de la peur s’est abattu sur le pays. »

Car, avec la lecture du passé, on touche du doigt ce qui se passe actuellement en Iran. Un peuple poussé à bout, qui va jusqu’au bout de la révolte, quel qu’en soit le prix.

C’est pareil en ce moment qu’en 1978 : « l’Iran danse sur un volcan. La terre gronde de plus en plus fort, la secousse menace, l’éruption n’est qu’une question de jours, les flots de colère vont se répandre inexorablement, un magma révolutionnaire et fumant qui menace de recouvrir le pays. »

 

J’ai beaucoup aimé aussi la résilience, l’apaisement que peut apporter la peinture et l’art en général. Ce qui devient la raison de vivre d’un gamin misérable, ce qui l’ouvre au monde, ce qui lui permet de grandir et de percevoir avec sa sensibilité, toute l’essence d’un tableau.

 

Un roman riche d’enseignements sur la complexité du pays et son contexte historique et social. A lire, si on veut mieux saisir l’Iran.

 

Lu dans le cadre du prix Orange 2023.

Je remercie la Fondation Orange et les Éditions Plon de m’avoir permis de découvrir ce très beau roman.

 

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