vendredi 25 juillet 2025

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Rentrée littéraire – parution le 4 septembre 2025

Un bel hommage, infiniment lucide, aux ONG.

On est loin de l’image « romantique » que l’on peut se faire d’une ONG et notamment de MSF. Car Solenn Honorine, grand reporter en Afrique, et chargée de communication pour MSF, s’inspire de son expérience pour un roman de fiction, situé à l’est de la RDC.

« Dans ce territoire grand comme un département français, les trois quarts des habitants sont d’ethnie hunde, hutue ou tutsie, un patchwork d’autres ethnies formant le reste. »

📌 A travers le personnage d’Alix, l’autrice utilise le « je » et parle cash. Sincère, et même en auto-dérision d’elle-même quelquefois. « La modestie ne m’étouffait pas. »  Cette narration à la 1ère personne renforce la proximité du lecteur face aux difficultés quotidiennes et aux horreurs des injustices et des combats.

D’abord, il n’y a pas que les médecins. Il y a tous ceux qui gravitent autour et qui sont indispensables au bon fonctionnement, comme la narratrice, qui est « watsan », (Water and sanitation - technicien eau et assainissement). Elle a la charge essentielle de comprendre et résoudre tous les problèmes des eaux. Essentiel lors des épidémies de choléra…

Une mission souvent ingrate : il faut accepter de faire et refaire ce qui a été détruit par les combats ou les pillages. « A Katalo, où le centre de santé a été entièrement pillé et en partie brulé, je remets les installations sanitaires aux normes pour la deuxième fois en moins de deux mois. »

📌 Et ensuite dans cette jeune femme légère, qui est partie sur un coup de tête à la frontière est du Congo, il y a une prise de conscience, une remise en question et une quête de sens.  

Une expérience éprouvante qui modifie la vision du monde et donne un sens à sa propre vie : être utile à l’autre. « Je veux apporter ma petite pierre à l’édifice. »

📌 Eh oui ! Au sein d’une équipe MSF, on soigne tout le monde sans distinction, les victimes comme les meurtriers. Et cela peut être difficile à comprendre quand on est épris de justice et d’empathie pour les plus faibles…

Encore plus difficile à accepter quand il faut risquer sa vie pour rapatrier un agresseur et un assassin, qui s’est attaqué également à MSF…

« Je nous considérais comme intouchable, protégés par nos bonnes intentions. Cette intrusion d’inconnus dans notre antre, notre zone de sécurité, c’est un viol. »

📌 Moment entre parenthèses, un peu magique, quand Alix aide à mettre au monde un enfant, elle qui n’en veut pas ! « Je me cramponne au petit être neuf, débordée par une émotion primaire, animale. Je ne me suis jamais sentie aussi humaine. »

📌 J’ai beaucoup aimé ce témoignage dur et réaliste de l’humanitaire. Il faut, si on veut soigner les blessés, les malades, composer avec les pouvoirs locaux, plus soucieux de leur image que du bien-être et de la santé des habitants.  Composer avec les chefs de guerre et ainsi obtenir des droits de passage pour aller soigner. Toujours le même objectif : l’urgence sanitaire. Même si l’homme qu’on opère est pourri et qu’on le retrouvera ensuite avec une kalach, dès qu’il sera rétabli…

« Ce n’est pas changer le monde, mais faire ce qui est en ton pouvoir pour réparer le corps de l’autre. »

Il faut aussi savoir qu’il y aura des dissensions, des conflits à l’intérieur d’une équipe, accepter les délais bureaucratiques, alors qu’on ne voit que l’urgence.

📌 Et je pense que c’est là, toute la beauté de ce premier roman. Demeurer Humain, Raisonnable alors que tout est déshumanisé et furie autour de soi.

📌 Seul bémol : la limite ténue entre réalité et fiction. A certains passages, c’est visiblement basé sur des faits réels, puis les personnages reprennent le dessus pour la fiction… Un sentiment de flottement…

Un récit à découvrir !

Merci à Netgalley et aux éditions de l’Archipel.

 

Extraits

 📌 « Pourtant, j’ai bien compris qu’ici il n’y a ni méchants, ni gentils. Il y a la guerre et puis c’est tout. »

 📌 « Dans ce territoire grand comme un département français, les trois quarts des habitants sont d’ethnie hunde, hutue ou tutsie, un patchwork d’autres ethnies formant le reste. »

📌 « La modestie ne m’étouffait pas. »

 📌 « Je me cramponne au petit être neuf, débordée par une émotion primaire, animale. Je ne me suis jamais sentie aussi humaine. »

 📌 « Que pèsent mon intérêt, ma fierté, mes frustrations, mon égo, face à la peau beurrée d’un nouveau-né, son souffle sur ma peau ? »

 📌 « Mais ici… ici, on sauve des vies. On a les pieds dans la merde, et la tête haut, haut dans les étoiles. »

 📌 « Les haines anciennes alimentent les intérêts nouveaux, la rumeur entretient la peur et les armes sortent de terre. »

 📌 « Ce n’est pas changer le monde, mais faire ce qui est en ton pouvoir pour réparer le corps de l’autre. »

 📌 « A Katalo, où le centre de santé a été entièrement pillé et en partie brulé, je remets les installations sanitaires aux normes pour la deuxième fois en moins de deux mois. »

📌 « Je nous considérais comme intouchable, protégés par nos bonnes intentions. Cette intrusion d’inconnus dans notre antre, notre zone de sécurité, c’est un viol. »

📌 « Alix, Ulrich, Esther, Jeff et les autres n’existent pas, pourtant ils sont des milliers. Une bande d’humains, les pieds dans la boue et la tête dans les étoiles ».

 

 

 

 


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