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Une pépite délicate et intense sur la vie, la vieillesse, la décrépitude, la mort. Mais aussi sur le bonheur simple, qu’on savoure en connaissant son prix.
🍂"Miséricordia" est la reproduction fidèle du témoignage audio de Maria Alberta, résidente en maison de retraite, l’Hôtel Paradis, et mère de l’autrice. S’y rajoutent 38 notes écrites par Maria, semblables à des haïkus, qui contribuent à l’organisation du récit.
🍂Maria Alberta est une vieille dame en fauteuil roulant, dépendante des soignants pour la mobilité, les soins de toilette, mais dont les capacités cognitives sont demeurées intactes.
Habituée aussi à commander, à faire prévaloir son avis, notamment auprès de sa fille. Incompréhension de sa part quand sa fille se révolte, ne suit pas ses avis. La vieille dame comprend, accepte, (force de l’amour maternel et filial) et grandit en maturité.
Comme quoi, il n’y a pas d’âge pour s’améliorer…
🍂Elle raconte son quotidien avec une infinie lucidité :
- Émouvant dans ses entretiens, ses questionnements avec les autres pensionnaires et sa famille.
- Terrible et existentiel quand elle parle de la « nuit » ( la mort) qui vient la réveiller, la visiter, la questionner, ou quand le décès d’autres pensionnaires est douloureux. « De nouveau, la nuit a traversé le mur, tourbillonné à l’intérieur de ma chambre et elle restée debout à côté de mon lit. »
En même temps, chez les personnes âgées, la mort fait aussi partie de la vie et le quotidien reprend comme avant : « Les premiers jours, le choc a ébranlé les paroles, les ombres et les horaires de l’Hôtel Paradis. Dans les coins, il y avait une rumeur de perte. Mais brusquement, le silence s’est installé autour de sa personne et des évènements, et la mort a cessé d’exister. »
- Terrifiant quand elle évoque l’attaque des fourmis sur les résidents.
- Critique quand il s’agit du personnel : les gentils, les bienveillants et ceux qui n’ont aucune considération. Déshumanisation du système.
« Elle de celles qui ne nous donnent pas nos lunettes, elle nous les jette. Elle pousse les fauteuils roulants par derrière, sans se montrer, on est poussés par des fantômes qui ne parlent pas. »
- Souvent tendre à propos des amours d’une autre résidente qu’elle défendra bec et ongles quand celle-ci sera accusée par l’administration : « Vous pensez donc que Dona Joana Amaral n’a pas dormi avec le sergent cette nuit-là ? Qu’elle n’a pas écouté un match de football brésilien toute la nuit et qu’elle n’a pas dansé en chemise de nuit au son des boléros devant le sergent qui a fini par succomber à une crise cardiaque ? »
🍂Une vieille dame lucide et attachante.
« Quoique différemment, nous pensions certainement tous que la situation démontrait l’étendue de notre dépendance, la révélation de notre fragilité. Nous étions des êtres à l’abandon que les soins de la résidence berçaient d’illusions. (…) La décrépitude de chacun s’amplifiait face à la décadence de tous et aboutissait à la honte. »
🍂La vie ne s’arrête pas aux portes de la maison de retraite. Elle continue, malgré ses vicissitudes. Même ralentie, elle peut être belle et savourée dans chacun de ses instants
Ce que j’ai le plus apprécié dans ce beau roman est la justesse. Celle du mot, celle de la situation, celle des personnages. Tout dans la nuance.
Un grand merci aux éditions Métailié !
Extraits
🍂« Mais le visiteur est invité à laisser au portail tout signe de tristesse : à l’intérieur, le résident attend votre joie.
Ici, tous ensemble, nous sommes une famille paisible : admirez les belles fleurs de notre jardin avant de pénétrer dans cette maison. Cette résidence est un parterre magnifique et les résidents, nos pétales les plus chéris. »
🍂« Je sais que le bonheur est une denrée très rare. On doit le garder sur le cœur quand il nous touche de près, en remplir toutes les poches de son âme, pour servir de bouclier quand son contraire se produit. »
🍂A propos d’Anita, la nouvelle Directrice et ex-aide-soignante
« Et je pense que, parce qu’elle doit tout diriger, elle ne possède plus rien de ce qui avait fait d’elle une personne aimée. »
🍂« Mort ennemie, arrête-toi là à la porte d’entrée, puisque l’image du sergent vient faire signe à la vie. Tous vivants unis, vivons. »
🍂« Elle est revenue et moi, je n’ai pas reconnu ses pas. »
🍂« De nouveau, la nuit a traversé le mur, tourbillonné à l’intérieur de ma chambre et elle restée debout à côté de mon lit. »
🍂« Elle de celles qui ne nous donnent pas nos lunettes, elle nous les jette. Elle pousse les fauteuils roulants par derrière, sans se montrer, on est poussés par des fantômes qui ne parlent pas. »
🍂« Vous pensez donc que Dona Joana Amaral n’a pas dormi avec le sergent cette nuit-là ? Qu’elle n’a pas écouté un match de football brésilien toute la nuit et qu’elle n’a pas dansé en chemise de nuit au son des boléros devant le sergent qui a fini par succomber à une crise cardia🍂que ? »
🍂« Les premiers jours, le choc a ébranlé les paroles, les ombres et les horaires de l’Hôtel Paradis. Dans les coins, il y avait une rumeur de perte. Mais brusquement, le silence s’est installé autour de sa personne et des évènements, et la mort a cessé d’exister. »
🍂« J’ai pensé : ils vont déjeuner et ils m’ont oubliée. »
🍂« Ce que le médecin pouvait faire, il l’avait déjà fait. Il avait prescrit des cachets en tapant très vite sur son ordinateur et je crois que c’était pour toujours. Je ne veux pas de simulacres médicaux, tout le monde sait ce qui se passe, je ne veux pas participer au théâtre des faux-semblants du genre avec cette pommade je vous sauverai, madame, gardez espoir, vous irez mieux et autres phrases vides de sens. »
🍂« Quoique différemment, nous pensions certainement tous que la situation démontrait l’étendue de notre dépendance, la révélation de notre fragilité. Nous étions des êtres à l’abandon que les soins de la résidence berçaient d’illusions. (…) La décrépitude de chacun s’amplifiait face à la décadence de tous et aboutissait à la honte. »
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