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« Les semaines, les mois, les années qui suivent un échec en politique sont ceux qui s’écoulent après un deuil – pourquoi se mentir ? On croit ne jamais s’en remettre. Chaque sortie publique vous rappelle votre mort sociale. N’être plus qu’un acteur secondaire d’un monde où l’on rayonnait, perdre le pouvoir quand on l’a exercé, est une épreuve existentielle. »
📙Karine Tuil analyse avec une réelle maîtrise, tous les éléments du Pouvoir et son influence perverse dans la sphère sociale, mais aussi dans la sphère privée : l’hyper médiatisation, l’élitisme, la dictature de l’apparence, de la beauté, de la forme et du sexe, les jeux du pouvoir dans le couple, mais aussi la fragilité, la souffrance, l’addiction de ceux qui jouissent de ce pouvoir.
📙Le propos est juste, passionnant, très proche de la réalité de certains milieux… Édition, cinéma, médias, et bien sûr, politique. Le même milieu en fait…
Il y a un peu de François Hollande et de Nicolas Sarkozy dans le personnage de Lehman.
📙L’écriture est fluide, précise, le scénario accompli. L’analyse psychologique des personnages est intéressante, à la limite quelquefois de la caricature, mais cela n’est pas gênant, car les attitudes sont exacerbées dans une bulle élitiste, exposée à tous les vents.
📙J’ai beaucoup aimé les narrations de Marianne (l’ex-femme de l’ex-président de la République). Elle illustre parfaitement tous les dommages collatéraux de l’exposition publique : « On juge, on attaque sur le physique, sur la fragilité psychique, sur des contextes personnels, on commente les actes et les paroles des gens sur les réseaux sociaux sans penser à l’effet que cela produit sur leur vie : ça détruit. »
📙La 1ère partie, « Le capital » m’a intéressée comme la lecture d’un essai. Texte froid et sans émotion. La seconde partie « Persona » consacrée au Festival de Cannes, est beaucoup plus incarnée et dense. Là, réellement passionnante.
Cannes, illustration au scalpel d’un milieu pathologique avec Hilda, actrice et nouvelle épouse de l’ex-président : « Hilda se sentait vulnérable, fragilisée par l’image que lui renvoyait un milieu où vous n’étiez jugé que sur votre beauté, votre surface médiatique et le pouvoir économique qui en résultait : celle d’une femme dont le potentiel érotique commençait à décliner. Une femme qui devrait inévitablement, passer la main. »
La question de la mue d’un roman en film est bien posée, également. Marianne, l’autrice, ne reconnaît pas son histoire. Là où elle a exposé la violence faite aux femmes, elle retrouve un scénario et des images de voyeurisme. Sous prétexte de dénoncer, on cherche le sensationnel et surtout le bankable.
« Je ne reconnais rien de l’histoire que j’ai racontée : tout a été amplifié, déformé, caricaturé. (…) le film baigne dans une ambiance glauque, ambiguë, malsaine. Je comprends à présent pourquoi il n’a pas voulu me le montrer : il redoutait ma réaction. »
Marianne est, par ailleurs, le seul personnage auquel je me suis attachée.
📙Un roman intéressant. Je regrette seulement d’être restée en observatrice durant toute la 1ère partie du récit.
Cela n’empêche. Je conseille cette lecture à tous ceux qui aiment percevoir derrière le miroir, la réalité des choses.
Les guerres du Pouvoir et ses dommages irréversibles…
Extraits :
📙« Lehman détestait les éditeurs parisiens, ces commerçants qui se vantaient d’être de gauche, mais baisaient les auteurs à coup d’à-valoir minables et de pourcentages dérisoires, qui exigeaient d’eux la moitié de leurs droits audiovisuels et les envoyaient sur les plateaux télévisés et les salons littéraires faire les putes sans autre dédommagement qu’un taxi pré-payé aller-retour. »
📙« Les semaines, les mois, les années qui suivent un échec en politique sont ceux qui s’écoulent après un deuil – pourquoi se mentir ? On croit ne jamais s’en remettre. Chaque sortie publique vous rappelle votre mort sociale. N’être plus qu’un acteur secondaire d’un monde où l’on rayonnait, perdre le pouvoir quand on l’a exercé, est une épreuve existentielle. »
📙Marianne – l’ex :
« On juge, on attaque sur le physique, sur la fragilité psychique, sur des contextes personnels, on commente les actes et les paroles des gens sur les réseaux sociaux sans penser à l’effet que cela produit sur leur vie : ça détruit. »
📙« Hilda se sentait vulnérable, fragilisée par l’image que lui renvoyait un milieu où vous n’étiez jugé que sur votre beauté, votre surface médiatique et le pouvoir économique qui en résultait : celle d’une femme dont le potentiel érotique commençait à décliner. Une femme qui devrait inévitablement, passer la main. »
📙« Lehman lui avait confié un soir, après le verre de trop : « Le sexe que tu as pendant ta vie politique est le meilleur. C’est excitant d’avoir peur. C’est aphrodisiaque d’être désiré par autant de femmes en même temps. »
📙Marianne
« Je ne reconnais rien de l’histoire que j’ai racontée : tout a été amplifié, déformé, caricaturé. (…) le film baigne dans une ambiance glauque, ambiguë, malsaine. Je comprends à présent pourquoi il n’a pas voulu me le montrer : il redoutait ma réaction. »
📙« le pouvoir est dangereux, impur ; plus on l’exerce, plus on occulte la violence et la domination qu’il suppose : il isole, altère les relations et jusqu’à la perception que l’on a de soi. C’est une jouissance peut-être mais une jouissance qui abime. »