vendredi 19 avril 2024

💙💙💙💙💙

Une magnifique fresque historique et romanesque de 1914 à 1989 en Russie. L’histoire de deux frères russes : Yvan, le plus jeune et Alexis, l’ainé.

Tous les deux ont envie d’un autre régime, plus juste, plus égalitaire, plus protecteur envers les plus pauvres.

Yvan, obsédé  par le concept d’une société sans classes va radicaliser ses positions, soutenir Lénine, puis Staline. Peu importe le temps qu’il faudra, peu importe les morts, peu importe les moyens utilisés, «seul l’objectif compte, pas les moyens. »

Un intégriste du communisme (« le communisme élève l’humanité en l’arrachant à la nature, à la biologie, aux liens du sang. »),  qui n’hésitera pas dans sa folie « robespierriste » à exécuter ses parents.

Alexis, très rapidement, comprend les dangers du communisme, prend ses distances avec son frère. Même s’il se fait rattraper par les installations coercitives et déshumanisées, des camps de « rééducation »  qu’a mis en place son propre frère...

Une analyse psychologique très fine dans laquelle vont s’insérer, avec la même maîtrise, d’autres personnages, comme Natalia et Kolya, respectivement sœur et frère et amis d’enfance d’Yvan et d’Alexis. Puis les autres amis de jeunesse, qui même s’ils sont allemands et anglais, prendront part à la guerre froide des années post deuxième guerre mondiale.

C’est passionnant et parfaitement documenté. C’est simple : le lecteur est dans les champs de bataille en Russie, les « rouges » contre « les blancs ». Les uns aussi déshumanisés, aussi violents que les autres.

« Rester vivant signifiait tuer. Bataille après bataille, l’âme scarifiée par l’assassinat de ses parents par la main de son propre frère, une soif inextinguible de sang avait gagné ses entrailles. »

Le lecteur lutte aussi contre les nazis, contre l’avancée des allemands puis leurs défaites. Il est présent également dans les premiers camps de « rééducation » russes où la barbarie est déjà présente, et dont Hitler va s’inspirer. Sans oublier la guerre froide, où la valeur de l’être humain est proche du zéro, face aux idéologies qui s’affrontent.

Bien sûr, on connait tous,  les événements auxquels se réfère Harold Cobert. Mais là, grâce à une plume puissante et juste, les mots se chargent de sens, de chair et de tripes.

C’est surtout un magnifique plaidoyer contre les guerres et tous les régimes totalitaires qui broient les opposants mais aussi ceux qui adhèrent consciemment à la cause, ceux qui se persuadent que la fin justifie les moyens.

Un engrenage dans lequel il faut toujours pousser plus loin la déshumanisation et la barbarie pour maintenir le système en place et se maintenir soi-même en vie.

Via un roman, c’est une analyse passionnante de géopolitique. Comprendre avec des êtres vivants mis en scène, les causes, les ressorts, les fonctionnements internes des régimes totalitaires.

« Il constata la poussée des forces politiques extrêmes dans la majorité des pays européens (…), tous fleurissant sur la misère et la rancœur essaimées par la Grande Guerre »

Merci pour cette incarnation du siècle passé en Russie, puis en URSS. 

J’ai infiniment apprécié ce roman à l’alchimie parfaite entre le scénario tendu, la justesse de la plume et la psychologie de personnages bien campés, très crédibles, attachants ou répulsifs. Surtout pas caricaturaux.

Quel souffle et quelle puissance dans cette épopée historique que j’imagine facilement adaptée sur le grand écran.

Merci Harold Cobert !

 

Livre lu dans le cadre du Prix Orange 2024.

Je remercie Lecteurs.com et les éditions les Escales pour ce bonheur de lire.

 

 

 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire