dimanche 26 novembre 2023

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Éducation, violence….

L’un pour combattre l’autre.

Et finalement l’un toujours confronté à l’autre.

Quels que soient les époques et les pays...

 

Ce que démontre magnifiquement le roman graphique de Christian Lax. Présenté par une belle couverture, aux traits ciselés comme il sait si bien le faire.

La montagne, la neige, deux hommes remontent un sentier couvert de neige, à plusieurs mètres l’un de l’autre. Sur le dos, ils ont une sorte de caisson marron. Le premier porte un habit qui parait remonter à quelques siècles, l’autre ressemble à un afghan…

 

Avant de détailler l’histoire, quelques mots sur le graphisme, car il est particulièrement séduisant.

Les premières pages plongent immédiatement le lecteur dans le contexte du récit. Trois pleines pages entières, la montagne dans les tons bleutés, un homme marche lentement et difficilement dans la neige. Un vrai tableau qu’on aimerait encadrer…

Ce que j’apprécie dans le dessin de l’auteur, c’est sa variété et sa justesse.

Des situations suggérées en quelques coups de pinceaux, quasiment monochromes et d’autres, très détaillées et coloriées.

Par exemple, les images de Kaboul accompagnent admirablement la trame du récit : sombres, avec la seule lumière des personnages.

 

XIXème siècle - « L’université des chèvres », c’est le nomadisme enseignant. Les instituteurs se déplacent pour enseigner aux enfants perchés dans les montagnes.

Fortuné est l’un de ceux-ci. Il porte trois plumes à son chapeau « car son savoir est triple. Il n’a que 17 ans, mais peut enseigner lecture, écriture et chiffres ».

Un instituteur infiniment apprécié des enfants qui devra modifier son activité ( lois Guizot obligent, qui demandent un brevet d’instituteur) et proposer une activité de colporteur de livres, toujours itinérant, toujours autant apprécié.

Jusqu’au moment où il comprend que les livres sont désormais rejetés : concentrés sur leurs lectures, les gamins ne font plus attention aux troupeaux de chèvres.

Un départ et une nouvelle vie en Californie… Son enseignement va se poursuivre chez les indiens Hopis.

« Dans l’école de Fortuné, qu’il a baptisée l’université des chèvres, les enfants à lire, à écrire et à compter sans pour autant renier les savoirs hérités des aînés. » Magnifique double page sur le nid d’aigles des hopis, pages 30 et 31.

 

L’histoire se poursuit de nombreuses décennies plus tard avec Arizona, arrière-arrière petite fille de Fortuné, journaliste particulièrement sensibilisée par les attentats dans les écoles, et farouchement opposée à la NRA.

« Cette tuerie en milieu scolaire est la 18ème en six semaines. »

Une même temporalité, deux lieux différents. Afghanistan – province du Pandjchir à 100 km au nord de Kaboul – Sanjar, enseignant nomade attendu et aimé par les petits afghans dans les villages reculés. Mais comme Fortuné, presque deux siècles plus tôt, il devra arrêter. Les mollahs ont décidé que la seule école était l’école coranique. Pour les garçons. Pour les filles, elles restent au foyer avec leur mère.

Les vies de l’afghan Sanjar et de l’américaine Arizona se croisent. Cette dernière est black-listée pour ses prises de position anti NRA. A la place, on lui propose un reportage en Afghanistan sur les femmes afghanes résistantes. Son fixeur (« guide, interprète, ange gardien) sera Sanjar. »

 

Un thème central, l’ignorance et l’obscurantisme et toutes ses conséquences dramatiques.

- L’éducation des filles toute aussi controversée dans la France du 19ème siècle (« du moment qu’elles savent lire leur catéchisme, ça suffit ! ») que dans l’Afghanistan actuel. 

-  La persécution des amérindiens : « tuer l’indien pour sauver l’humain qui est en lui. Telle est notre mission. »

- Le travail de la presse et la puissance des lobbyings.  : « Le paradoxe aujourd’hui, est que tous les excès sont permis sur la toile, mais qu’il est ultra facile de museler ceux qui font leur boulot dans la presse. »

- La puissance de la NRA et le carnage des tueries dans les écoles aux USA, chez les résistants aux talibans en Afghanistan. Plus de 10.000 km les séparent et pourtant la même violence aveugle et sinistre frappe les enfants. Drôle de parallèle ? Pas tant que ça… Tellement réalistes, tellement bien portés par les personnages, qu’il fait froid dans le dos. La mort supportée par les enfants, les traumatismes et le sentiment que jamais cela ne s’arrêtera.

Le désespoir de Sanjar, rapatrié et prof en Californie : « dans son pays véritablement en guerre, Sanjar a tout fait pour préserver les enfants de la violence, l’école en tant que sanctuaire.il n’imaginait pas autre chose ici.

 

En conclusion, deux citations que j’apprécie particulièrement :

« L’éducation élève l’esprit » France du 19ème siècle

« L’éducation est l’arme la plus puissante pour changer le monde » Nelson Mandela.

 

 

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