lundi 18 novembre 2024

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Un récit passionnant sur le monde de l’édition, des médias et de la réalité du succès d’un livre. En sachant que cela peut s’appliquer à tous les domaines artistiques.

📕Delphine est une jeune éditrice de la maison Grasset.  En balade à Crozon, elle découvre une bibliothèque originale, celle des livres refusés.

Et elle y déniche une perle rare : « les dernières heures d’une histoire d’amour », dont l’auteur, Henri Pick, décédé était pizzaïolo. D’après sa veuve et sa fille, il ne lisait pas, n’écrivait pas, ne s’intéressait qu’à son boulot….

Il est édité chez Grasset et devient vite un best-seller phénoménal, basé sur le mystère de l’auteur. Les médias se succèdent chez la veuve, y compris La Grande Librairie, pour comprendre l’homme et les dessous de sa vie littéraire pour le moins énigmatique.

Delphine mène de main de maître la campagne de presse persuadée d’avoir trouvé le roman du siècle.

Son nouveau compagnon, Fred, primo-auteur d’un ouvrage édité mais sans succès de librairie, la soutient, puis juge rapidement qu’elle en fait trop et qu’elle délaisse tout le reste.

📕Les thèmes bien maîtrisés suscitent la réflexion.

✏ La difficulté du monde de l’édition, tant pour les pros que pour les auteurs.

- Pour l’éditeur, trouver le bon livre, c’est le texte, l’écriture, mais aussi et surtout celui qui se vendra, celui dont parleront les médias et les réseaux sociaux.

La tentation peut être grande pour un éditeur d’exploiter un bon filon.

Qu’est ce qui fait un bon texte ?

« Le texte n’a plus d’importance. Ce qui compte, c’est l’idée qu’il fera parler de lui. (…) Pourtant tout le monde parle de ton livre sans que le texte ait la moindre importance. »

- Pour l’auteur, il ne suffit pas d’être publié, il fait être lu et reconnu. C’est parfaitement illustré par le personnage de Fred.

« Mais il y une violence presque pire à celle de ne pas être publié : rester dans l’anonymat le plus complet. »

C’est aussi une satire sociale : l’apparence prime souvent sur la réalité.

« Je voulais dévoiler tous les détails de cette affaire, tout en analysant notre société, qui se focalise beaucoup plus sur la forme que sur le fond. »

📕 Je n’ai pas lu le roman éponyme de David Foenkinos, mais j’ai vu le film. Ce dernier est plus fort et prenant que la BD, surtout dans la première partie du texte. Mais j’ai apprécié infiniment le scénario, les questions posées et la façon dont l’auteur nous perd avec jubilation dans des fausses pistes.

Un bémol sur le coup de foudre entre Delphine et Fred que j’ai trouvé peu crédible, voire un peu niais.

J’ai adoré les paysages, qui m’ont fait penser au « coup de patte » de Bruno Duhamel. Voir les pages 54 et 119. Mais j’ai moins aimé les personnages, notamment les bretonnes qui presque ont presque toutes la même tête : très ronde, avec un nez patate, comme Magali, comme la fille d’Henri Pick. Légèrement caricatural

📕Un excellent moment de lecture, comme souvent avec Pascal Bresson, dont j'avais beaucoup aimé "La rafle d'Izieu" et le "Simone Veil". 

 

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Une BD sur un sujet fort et sensible, traité toute en douceur et en émotion.

📌Biarritz – 1965 – Un couple de quadra d’origine allemande. Franz est la recherche d’une maison, d’une femme qu’il a connue durant la guerre. Quand Léo ( Léocadie) leur ouvre et parle avec eux, elle apprend aussi que Félix, jeune soldat allemand et son amour de jeunesse, est mort en Russie.

📌 L’autrice s’est inspirée de l’histoire de sa grand-mère, Léo, depuis l’occupation de son village en 1942, jusqu’à maintenant.

Celle de son amour avec Félix, des regards de travers sur Léo, mais aussi, et c’est émouvant, du besoin des plus jeunes, d’aimer, de vivre, quelles que soient les conditions extérieures. Sans oublier en 1945, la tonte des femmes pour « collaboration horizontale ».

📌 Un portrait très attachant que celui de Léo. Cassée par les événements, mais volontaire, résiliente, et toujours fidèle au souvenir de son premier amour.

📌 Un récit touchant et profond.  Accentué par la construction graphique : des intercalaires transparents avec des photos déchirées qui illustrent à merveille le titre : « Léo en petits morceaux ».

Les paysages sont de belles aquarelles et le dessin accentue avec justesse, les expressions des personnages.

Une vraie réussite ! Je retiens le nom de cette autrice-graphiste.

 

 

 

mercredi 13 novembre 2024

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Un premier roman dystopique qui se lit d’une traite.

📌 Un drôle de monde, où l’eau et l’énergie sont rationnées pour la majorité des habitants, une drôle de société où les femmes ont perdu tous leurs droits.  

Un seul avenir les attend : être une épouse dévouée à son mari, à ses enfants, à l’entretien de la maison. La soumission est le maître mot,  et celles qui refusent, se retrouvent au ban de la société dans des communautés fantômes et misérables.

📌 Dans un scénario maitrisé et bien tendu, l’autrice raconte l’histoire d’Irvy. Une jeune fille de 18 ans, qui se résout à passer son diplôme « d’Arts Ménagers » ( le seul accessible aux filles, et « utile ») alors qu’elle est passionnée de mécanique.

Un mariage est arrangé par la riche et arrogante famille d’’Urvoy avec la sienne : elle devra épouser le fils Créon. Un homme détestable, brutal et narcissique.  

La découverte d’une malle de livres dans son grenier, d’un écrit de sa grand-mère ( personnage honni dans sa famille)  et un séjour chez les d’Urvoy vont changer le parcours d’Irvy qui semblait toute tracé.

📌 Un excellent roman dont les pages se tournent toutes seules. Difficile de le lâcher avant de savoir ce qu’il adviendra d’Irvy et de sa famille. L’écriture est simple, précise et fluide.

Seul bémol : le manichéisme des personnages.

📌Cela n’empêche, c’est un bon moment de lecture où les problèmes de féminisme, d’environnement et d’injustice sociale, de sororité  sont finement traités.

Un premier roman prometteur.💙


dimanche 10 novembre 2024

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 C’est d’abord la plume de Viola Ardone qui m’a embarquée dans
 l’histoire de son personnage central, Olivia Denaro.

Une plume aussi simple, légère et sensible, que fluide et précise. Un ton qui correspond parfaitement à la narration d'Olivia. Adolescente puis femme, elle exprime ses doutes, ses envies, reprend les sentences strictes de sa mère, et observe la vie de sa famille.  Et par conséquent, retrace une vision passionnante de la société italienne des années 60 à 80, dans un petit village du sud.

📌Les filles sont libres en Italie, à cette époque. Très libres.  Jusqu’au moment où elles sont réglées. Ensuite, c’est : « Marche en regardant tes pieds, file droit et reste à la maison »

« A partir d’un certain âge, il faut garder les filles aux abris. Ici, le garçon est un brigand et la fille c’est comme une carafe : qui la casse la ramasse. »

Hors le mariage, souvent arrangé par les parents, pas de salut pour les filles.

📌 Ce roman aurait pu être le x-ième sur les conditions des femmes, mais c’est bien plus :  une juste analyse du patriarcat, des traditions et du féminisme : 

- L’assurance de la virginité en échange d’une situation sociale.

- Le rôle des mères qui souffrent de cette situation de femmes mineures et irresponsables mais la transmettent et l’imposent à leurs filles

- Le rôle des hommes chargés du savoir, de la charge financière et affective de la famille. Les coupables, les méchants, ou les victimes d’un système ?

Car pour une fille, ne pas être sage, vouloir être indépendante est une tare. Pour un homme, ne pas être viril en est une également. C’est parfaitement illustré par la figure du père d’Olivia. Un homme taiseux, sensible et… respectueux.

« Comment un homme, un père de famille, pourrait-il savoir ce qui est bon pour chacun juste parce qu’il porte la culotte, comme on disait autrefois ? Je suis seulement un paysan, ce que je sais faire, c’est planter une graine et aider la plante à pousser malgré la sècheresse, les pluies soudaines, les violents. »

- Le rôle des femmes entre elles, qui se jugent selon les critères sexistes et les entretiennent : « Tu vois ? On est les premières à juger : trop court, trop long, trop moulant, trop provocant. On répète les mots des hommes au lieu d’essayer de les changer. Ce qui t’est arrivé n’a rien à voir avec l’amour. L’amour ne s’impose, il se donne. »

- La force de caractère nécessaire face aux langues de vipère d’un petit village, face au sentiment d’exclusion. Surtout pour une femme qui se veut libre, tout simplement autonome, sans intégrer une organisation quelconque.  

« Les femmes ! Enfin, pourquoi faut-il toujours qu’on parle d’elles au pluriel pour qu’elles soient prises en compte ? Les hommes, eux, ils valent quelque chose, même pris isolément. Nous, par contre, on doit se mettre en rang, former une troupe, comme si on était une espèce à part. je ne veux être le soldat d’aucune armée, Magdalena. Je ne veux être sous aucun drapeau : associations, partis, groupes d’activistes, rien de tout ça ne m’intéresse. »

📌 C’est aussi une belle histoire sur une famille, sur l’amour profond entre ses membres, malgré les différences de vue. Le personnage du père d’Olivia est sublime en matière d’amour et d’engagement face à ses enfants.

Seul bémol : l’enlèvement d’Olivia, que j’ai trouvé un peu rocambolesque.

📌 Un beau roman qui suscite la réflexion et la gratitude pour nos mères, nos grands-mères, arrière-grand-mères qui se sont battues pour être respectées, responsables et libres de leurs choix.

 

 

samedi 9 novembre 2024

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Le scénariste, Bertrand Galic : « l’objectif est bien de raconter « Marcel » plus que « Cerdan », le « cœur » au moins autant que les « gants ». (…) J’ai voulu aborder les côtés les plus intimes et les plus sensibles du personnage, évoquer ses failles autant que ses forces. »

En un premier temps, le graphisme de la couverture m’a séduite. Sur un fond pastel, l’ombre d’une femme agenouillée devant un enfant. L’image de l’amour et de l’attention maternelle.

📌 Octobre 1949 – Les Açores - « L’ile est ton nid, l’océan te borde. »

Marcel Cerdan, « le bombardier marocain » vient de périr dans un crash d’avion.

Casablanca – 1924 – l’enfance de Marcel. Un petit garçon qui rêve de foot, que son père brutal et autoritaire oblige à boxer car il a discerné le potentiel du gamin. Une mère aimante et attentive, dont il est très proche, mais qui n’a pas le droit à la parole.

Marcel rejoint un club de boxe, découvre la camaraderie, s’entraîne et ne perd aucun match.

1941 - Ce n’est pas uniquement un boxeur, un jeune homme qui aime les copains et les filles. Il a envie de servir la France et rejoint, à sa manière, la Résistance : continuer les tournois et reverser une partie de ses gains à la Résistance.

1946 – Marcel est marié, amoureux de sa femme même s’il a reconnu un enfant adultérin. Les gants, la force de la boxe, mais surtout un homme fiable, chaleureux et engagé. Un « gentil », un homme de cœur…

Il restera attaché et attentif à sa femme, Marinette et à ses trois fils,  quand il rencontre Édith Piaf, en juillet 1946.

📌C’est une BD passionnante pour le portrait fidèle qu’elle trace de Marcel Cerdan dont je ne connaissais – je l’avoue – que la figure du boxeur et l’idylle avec Piaf.

Pas forcément quelqu’un dont l’histoire m’intéressait…

Un vrai personnage de dramaturgie, à la vie pleine et courte. Un bonhomme intéressant !

Comme quoi, la lecture nous ouvre les portes de la connaissance, et ferme celles des idées toutes faites.

Merci aux éditions Delcourt et à Netgalley pour ce moment de lecture passionnant.