dimanche 16 novembre 2025

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Quel plaisir de retrouver chaque soir, ce récit tendre, grave et drôle ! Pour moi, c’est le signe d’un coup de cœur : se réjouir à l’idée de retrouver les personnages quittés la veille.

👻 1934 - Les Montgomery, riche famille anglaise, habitent Winnicott Hall dans le Sussex. Archie, le père est archéologue et souvent absent de la maison. Lucille la mère, se soucie des apparences et s'inquiète toujours beaucoup pour son mari et son fils Georges. Ce dernier a 10 ans, il est aveugle et couvé par sa mère.

Quand il faut retrouver une nouvelle préceptrice, c’est Viviane Lombard, une Française, qui est choisie.  Par défaut. Il faut dire que cette femme n’est pas sortable, habillée comme l’as de pique et avec un franc-parler déconcertant.

« _Moi, je dis qu’il faut s’attendre à tout de la part d’un peuple qui a guillotiné son roi ! »

👻 Pourtant, l’alchimie fonctionne parfaitement entre Viviane et Georges. Tous les deux sont intelligents, ont un sens de l’humour particulièrement développé et une grande franchise. Georges se perçoit - avec l’éducation hyper protectrice de sa mère - comme un handicapé, quelqu’un qui ne pourra jamais rien réaliser...

En même temps, ce grand manoir craque, bouge au rythme des fantômes qui l’habitent. Même les plus sensés, les plus sceptiques le constatent… Et la peur grandit…

👻 Tous les clichés d’une riche famille anglaise sont réunis :  la condescendance méprisante de l’aristocratie anglaise, le rejet des Français et même le snobisme du majordome snob à l’égard des « subalternes » dont Viviane, en premier lieu. Quand cette française va-t-elle enfin être renvoyée ?

Pourtant, l’ensemble fonctionne à merveille : personnages crédibles et bien campés, suspens familial et progression de l’angoisse des habitants face aux fantômes de Winnicott Hall

Un gros coup de cœur pour Georges et Viviane, les plus attachants.

👻 Un roman sur les liens spontanés et sincères qui unissent certains êtres et les aident à grandir.

Lu dans le cadre du Jury du Grand Prix des Lecteurs 2026 des éditions Pocket.

 

Extraits :

 👻« _ t’as qu’as voir les Montgomery ! Non, mais quelle idée de quitter sa femme et son gamin pendant des mois pour aller déterrer de la vaisselle cassée et des vieux os ? Monsieur a pas mieux à faire, franchement ? »

👻« _Moi, je dis qu’il faut s’attendre à tout de la part d’un peuple qui a guillotiné son roi ! »

samedi 15 novembre 2025

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Une relecture passionnante du personnage de Milady

Plus jamais, je ne relirai la trilogie : « Les trois mousquetaires », « Vingt ans après » et « Le vicomte de Bragelonne » de la même façon…

📕Au pied des remparts de Maastricht – 1673

D’Artagnan raconte à son ami et fidèle Lieutenant Philippe, l’histoire de Milady. On sent le doute quand il explique son jugement et sa mort en 1628 ainsi que le questionnement quand il revient sur le passé, dès 1609.

Qui était finalement Milady de Winter, ou Anne de Breuil ?

Un ange venu des Enfers, ou une femme dans un contexte d’hommes qui décide de ne pas se laisser faire. Qui décide de se venger des violences subies depuis la petite enfance. Une femme complexe comme l’analyse si bien, l’autrice. Une passionnée capable du pire et du meilleur.

De plus, elle est belle et intelligente. Elle a surtout appris à composer quand on ne peut vaincre avec la force.

📕L’autrice apporte à la magnifique épopée de Dumas, les nuances qui manquaient aux trois romans.

Dans le personnage d’Athos pourtant, on perçoit la passion de cet homme entier. Il aime à l’extrême, il haït à l’extrême quand il se sent trompé ou déçu. Droit, intransigeant, voire rigide, et Anne ( Milady) souple et manipulatrice.

Dans Les trois mousquetaires, c’est le vif et  la fougue de la jeunesse. Dans celui de l’autrice, c’est la maturité de D’Artagnan et ses doutes quant au bien fondé de la mort de Milady. 

📕Le thème central est celui de la vengeance. Comment elle empoisonne et détruit la vie de celui ou celle qui la détient serrée dans son cœur. Et c’est remarquablement traité.

La vengeance a détruit la courte vie de Milady, et elle empoisonne le cœur de d’Artagnan : châtiment justifié ou crime abominable envers une jeune femme. « Ils sont dix et elle est seule. » Besoin de raconter, d’expliquer à son Lieutenant, pour peut-être faire la paix en lui…

La vengeance comme une addiction, comme moteur de vie…

📕 La voix de Milady, c’est aussi celle de toutes les femmes qui ont voulu vivre, ne pas plier face aux traditions et au patriarcat.

« Femmes coupables d’être désirantes. Coupables d’être désirées. Coupables d’être innocentes. Coupables d’être rusées. (…) Toutes condamnées pour insoumission, pour impureté, pour traîtrise, pour être nées. »

Je n’étais pas trop tentée de le lire. Je me disais encore une histoire d’héroïne, de femme revisitée… Et puis la chronique de plusieurs lecteurs m’ont fait changer d’avis, et je les en remercie.

L’autrice reprend avec beaucoup de maîtrise la chronologie du roman de Dumas. Et Comme l’auteur du 19ème siècle, elle possède un sacré talent de conteuse qui nous tient en haleine d’un bout à l’autre.

 

 Extraits

📕 « La noirceur de cette femme menue qui n’a pas vingt-cinq ans les effraie. Ils sont face à la figure vivante du démon »

 

📕 « Au bout de quelques mois, Anne prit le parti de la vie à l’abbaye. Elle fut aidée en cela par un poème déniché dans un livre que lui avait prêté le père Lamandre. L’ouvrage se terminait par ce vers : Baise la main que tu ne peux pas couper. Cette incitation à la souplesse l’avait frappée. Anne avait renoncé à se révolter. »

 

📕 « Vous avez en vous, Anne, comme tout être humain, mais de façon plus extrême que la plupart d’entre nous, le meilleur et le pire. Bien que vous ne m’ayez jamais confié ce qui vous est arrivé, les violences qui vous ont été faites enfant ont allumé un brasier que j’aurais voulu vous aider à éteindre. Ne cherchez pas à faire justice vous-même. »

📕 « La vengeance est un poison. Il faut avoir pardonner, lui a-t-on seriné tant de fois, mais comment s’y résoudre ? »

 📕 Athos

« Anne cajolait, contrecarrait, manipulait avec un instinct de survie et une facilité de dissimulation qui me choquaient. Chaque me sortie me révélait un peu plus ses véritables appétits. Je la pensais droite, et la découvrais d’une souplesse alarmante. Je l’imaginais idéale, solitaire, et elle se montrait aussi mondaine qu’aguicheuse. »

📕 « J’ignorais alors ce qu’elle cherchait à expier et ce qu’elle espérait racheter par cette abnégation. »

📕 « Louise de la Fère venait le lendemain pleurer dans mes bras, puis elle faisait bonne figure, parce que comme moi, elle y avait été dressée : ne pas se plaindre, être gracieuse, être douce, accepter, se soumettre. »

📕 Athos – Olivier de la Fère

« Aujourd’hui, je ne suis plus digne d’être Comte de la Fère. J’ai perdu ce doit en tâchant notre nom d’une union infâme, et j’ai fauté à nouveau en punissant la coupable d’une manière qui me fait honte. »

📕 « Je crus que mon cœur allait exposer. Je pris mon fils dans mes bras et le serrai avec passion. Ces mots de tendresse et de guérison, personne ne mes les avait dits avant lui. »

📕 Le comte de Rochefort

« Très vite, j’ai compris qu’elle était à part. J’ai admiré son courage. Un courage inouï. Oui, Milady était une femme dangereuse pour qui l’offensait. »

📕 Pour l’autrice, Milady représente toutes les femmes :

« Femmes coupables d’être désirantes. Coupables d’être désirées. Coupables d’être innocentes. Coupables d’être rusées. (…) Toutes condamnées pour insoumission, pour impureté, pour traîtrise, pour être nées. »

 

 

 

 

 

 


mercredi 12 novembre 2025

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Je ne comprends pas : je ne suis du tout rentrée dans le roman de Cédric Sapin-Defour, que je trouvais un peu sentencieux, ( à tort, sans doute, car la BD est proche du roman) alors que la BD m’a happée dès les premières pages.

Peut-être est-ce le graphisme, les superbes couleurs, les attitudes d’Ubac précises et justes qui démontrent magnifiquement l’amour d’un maître avec son chien ou d’un chien avec son humain, qui m’ont touchée…

🐕 Car la BD met remarquablement en valeur la réciprocité de l’amour, mais aussi les réactions semblables entre humain et animal, et tout ce qu’il nous apporte.

« Ce chien me réapprend à lire le vivant qui nous entoure.

A écouter la musique de la nature…

Ses amplitudes…

Ses respirations…

Ses mystères…

Moi qui ne vois que le visible. »

Cela, tous ceux qui ont et aiment leur animal le savent, mais la BD l’exprime clairement et même le sublime.

🐕 Les pleines pages sont superbes, comme celle où Ubac joue avec un papillon – page 49, comme les paysages de montagne – pages 64 et 6, comme la scène dans le cimetière – pages 86 et 87

🐕 J’ai pleuré avec :  « Je n’avais pas fini de l’aimer » quand Ferdinand perd sa femme Marie, et quand Cédric perd Ubac. Un même chagrin pour la perte d’un être cher et proche. Et il ne se mesure pas sur une échelle :  un homme : 10 – un cheval : 8 - un chien : 6 – un hamster 4. C’est pareil, c’est le manque de ceux qui nous quittent, à 2 jambes ou à 4 pattes….

« Quand on me demande pourquoi j’ai écrit « Son odeur après la pluie », une seule s’avance. Elle est terriblement simple : je voulais me promener une dernière fois avec Ubac. Car une des offrandes de l’écriture, c’est de toucher l’espoir de revivre. »

Émouvant, drôle, tendre et tellement juste !

Un gros coup de cœur !

 

Extraits :

🐕 « Je n’avais pas fini de l’aimer » 

 

🐕 « Je n’ai pas arrêté de lui parler pendant tout le voyage

Je veux croire que c’est pour qu’il s’habitue à ma voix.

Mais en réalité, c’est parce que je suis stressé. Bien plus que lui… »

 

 🐕 « Avec Ubac, nous croisons régulièrement d’autres chiens… qui promènent leur maître….

 

🐕  « _ Il y a peu d’humains dont la mort me ferait plus de peine que celle d’Ubac, peut-être même aucun ! 

_Et bien, moi, je préfère les gens ! Mais surtout pas les paternalistes prétentieux ! Il ne te reste plus qu’à devenir végétarien pour cocher toutes les cases du cliché du bobo écolo et misanthrope.

_ Euh… Au fait, je…Je suis végétarien, moi… »

 

🐕 « En fait, cette cabane est une pure architecture d’avant-garde ! Tout le charme de l’extérieur et aucun des avantages de l’intérieur ! »

 

🐕 « Dico impertinent de la montagne 

Amputation : tradition népalaise

Coupe-vent : ancien nom pas cher du Gore-Tex

Déodorant : douche portative de l’alpinisme

Fable – compte rendu d’ascension

Fantasme : projet d’ascension

GPS : abréviation de goure-toi pas de sens » 

 

🐕 « Ce chien me réapprend à lire le vivant qui nous entoure.

A écouter la musique de la nature…

Ses amplitudes…

Ses respirations…

Ses mystères…

Moi qui ne vois que le visible. »

 

🐕 Après les premières et maigres rentrées de l’édition de son livre :

« La littérature ne nous nourrit pas, mais elle nous chauffe. »

 

🐕 « Des mots pour se souvenir…

Des mots pour te raconter…

Des mots pour ne pas être ce que tu n’aurais pas voulu que je sois..

Des mots pour vivre heureux comme tu l’étais… »

 

🐕 « Quand on me demande pourquoi j’ai écrit « Son odeur après la pluie », une seule s’avance. Elle est terriblement simple : je voulais me promener une dernière fois avec Ubac. Car une des offrandes de l’écriture, c’est de toucher l’espoir de revivre. »